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Déclaration introductive

Jean-Claude Trichet, Président de la BCE,
Lucas Papademos, vice-président de la BCE,
Bruxelles, 4 décembre 2008

Mesdames et messieurs, le vice-président et moi-même sommes très heureux de vous accueillir à cette conférence de presse ici à Bruxelles. Je voudrais remercier le gouverneur Quaden pour son accueil et exprimer toute notre gratitude au personnel de la Banque nationale de Belgique pour l’excellente organisation de cette réunion du Conseil des gouverneurs.

Nous allons à présent vous faire part des conclusions de notre réunion, à laquelle ont également assisté Mme Christine Lagarde, présidente du Conseil Ecofin, et M. Joaquín Almunia, commissaire européen chargé des Affaires économiques et monétaires.

Au terme de son examen régulier de la situation économique et monétaire, le Conseil des gouverneurs a décidé de réduire une nouvelle fois les taux directeurs de la BCE de 75 points de base. Cette décision s’inscrit dans le prolongement des deux réductions de 50 points de base des taux directeurs de la BCE annoncées les 8 octobre et 6 novembre 2008. Dans l’ensemble, depuis notre dernière réunion, les indications attestant la poursuite de l’atténuation des tensions inflationnistes se sont multipliées, et si l’on se place dans une optique prospective, les taux d’inflation devraient être conformes à la stabilité des prix à l’horizon pertinent pour la politique monétaire, soutenant le pouvoir d’achat des revenus et de l’épargne. Le recul des taux d’inflation s’explique principalement par la baisse des prix des matières premières et le ralentissement sensible de l’activité économique. En raison, pour une large part, de l’incidence de l’intensification et de la généralisation des turbulences financières, la demande, tant mondiale que dans la zone euro, devrait être modérée pendant une période prolongée. Parallèlement, tout en demeurant soutenu, le rythme sous-jacent d’expansion monétaire a continué à décélérer. Globalement, le niveau d’incertitude reste exceptionnellement élevé. Le Conseil des gouverneurs continuera d’assurer un ancrage solide des anticipations d’inflation à un niveau compatible avec son objectif à moyen terme. Il soutient ainsi durablement la croissance et l’emploi et contribue à la stabilité financière. En conséquence, nous continuerons de suivre très attentivement l’ensemble des évolutions au cours des prochaines semaines.

Permettez-moi d’expliquer notre évaluation plus en détail en commençant par l’ analyse économique.

Depuis septembre, les turbulences se sont intensifiées et généralisées sur les marchés de capitaux. Les tensions se sont propagées de plus en plus du secteur financier à l’économie réelle, et l’économie mondiale dans son ensemble en subit les effets négatifs. Dans la zone euro, un certain nombre de risques à la baisse pesant sur l’activité économique qui avaient été identifiés précédemment se sont matérialisés, entraînant au troisième trimestre une contraction de 0,2 % de la croissance du PIB en volume, en glissement trimestriel, selon la première estimation d’Eurostat. Les données d’enquêtes disponibles et les indicateurs mensuels pour octobre et novembre font apparaître un nouveau fléchissement de l’activité économique au quatrième trimestre 2008.

Sur la base de nos analyse et évaluation actuelles, nous pensons que la faiblesse de l’activité économique mondiale et la forte atonie de la demande intérieure persisteront au cours des prochains trimestres. Selon les projections macroéconomiques de décembre 2008 pour la zone euro établies par les services de l’Eurosystème, l’activité devrait ensuite se raffermir progressivement, à la faveur de la baisse des cours des matières premières et dans l’hypothèse d’une amélioration de l’environnement international et d’un affaiblissement des tensions financières. Ces projections tablent sur une croissance annuelle du PIB en volume comprise entre 0,8 et 1,2 % en 2008, entre -1,0 et 0,0 % en 2009 et entre 0,5 et 1,5 % en 2010. Ces chiffres traduisent d’importantes révisions à la baisse par rapport aux projections précédentes des services de la BCE pour 2008 et 2009 publiées en septembre. Les prévisions des organisations internationales ont également été revues à la baisse et sont globalement conformes aux projections de décembre 2008 établies par les services de l’Eurosystème.

Le Conseil des gouverneurs estime que les perspectives économiques restent entourées d’un degré d’incertitude exceptionnellement élevé. Les risques pesant sur la croissance économique sont orientés à la baisse. Ils sont liés, pour l’essentiel, à l’éventualité d’une incidence plus forte sur l’économie réelle des turbulences sur les marchés de capitaux ainsi qu’aux préoccupations concernant les pressions protectionnistes et les perturbations que pourraient entraîner les déséquilibres mondiaux.

Il est essentiel que l’ensemble des acteurs concernés apportent leur contribution à la mise en place de fondements solides en vue d’une reprise durable. Pour que celle-ci se concrétise aussi rapidement que possible, il est primordial de maintenir la discipline et une perspective de moyen terme dans l’élaboration des politiques macroéconomiques. C’est le meilleur moyen de soutenir la confiance. Les importantes mesures annoncées par les gouvernements pour faire face aux turbulences financières devraient être mises en œuvre rapidement afin de concourir à assurer la confiance dans le système financier et à empêcher des contraintes sur l’offre de crédit aux entreprises et aux ménages.

En ce qui concerne l’évolution des prix, le glissement annuel de l’IPCH s’est inscrit en net recul depuis juillet. Selon l’estimation rapide d’Eurostat, il s’est établi à 2,1 % en novembre, après 3,2 % en octobre et 4,0 % en juillet. Le repli sensible de l’inflation globale depuis l’été reflète essentiellement la baisse considérable des cours mondiaux des matières premières ces derniers mois, qui a plus que compensé l’incidence de la vive progression des coûts unitaires de main-d’œuvre au premier semestre 2008.

Pour l’avenir, le repli des prix des matières premières et l’affaiblissement de la demande nous amènent à conclure que les tensions inflationnistes continueront à s’atténuer. Le rythme annuel de progression de l’IPCH devrait encore se modérer au cours des prochains mois et être conforme à la stabilité des prix à l’horizon pertinent pour la politique monétaire. En fonction, principalement, de l’évolution future des cours du pétrole et des autres matières premières, il n’est pas exclu qu’une baisse plus rapide de l’IPCH se produise vers le milieu de l’année prochaine, surtout en raison d’effets de base. Toutefois, du fait également de ces effets de base, les taux d’inflation pourraient augmenter de nouveau au second semestre, de sorte que tout recul prononcé de l’IPCH devrait être de courte durée et n’est par conséquent pas significatif du point de vue de la politique monétaire.

Les projections de décembre 2008 établies par les services de l’Eurosystème vont dans le sens de cette évaluation. Elles prévoient une progression annuelle de l’IPCH comprise entre 3,2 et 3,4 % en 2008, revenant dans une fourchette allant de 1,1 à 1,7 % en 2009. Pour 2010, la hausse de l’IPCH devrait s’établir entre 1,5 et 2,1 %. Les projections relatives à l’IPCH pour 2008 et 2009 ont été sensiblement révisées à la baisse par rapport aux projections des services de la BCE publiées en septembre 2008, traduisant essentiellement le net repli des cours des matières premières et l’incidence de l’affaiblissement de la demande sur l’évolution des prix. À cet égard, je tiens à rappeler la nature conditionnelle de ces projections, qui s’appuient sur une série d’hypothèses techniques, dont les anticipations du marché relatives à l’évolution des taux d’intérêt à court et à long termes, ainsi que les contrats à terme sur le pétrole et les matières premières hors énergie. En outre, les projections se fondent sur l’anticipation d’une atténuation de la pression des salaires sur l’horizon de projection. Les prévisions d’organisations internationales font ressortir un scénario globalement similaire.

Abstraction faite de la volatilité à court terme de l’inflation globale, les risques pesant sur la stabilité des prix à l’horizon pertinent pour la politique monétaire sont plus équilibrés que par le passé. Un nouveau recul inattendu des cours des matières premières pourrait exercer une pression à la baisse sur l’inflation, alors que les risques à la hausse pour la stabilité des prix pourraient se matérialiser, notamment si le repli récent des cours des matières premières s’inversait ou si les tensions d’origine interne sur les prix s’avéraient plus fortes que prévu. Il est par conséquent essentiel que les décideurs en matière de fixation des prix et des salaires assument pleinement leurs responsabilités.

S’agissant de l’ analyse monétaire, différentes estimations du taux de croissance sous-jacent de l’agrégat monétaire large indiquent un rythme d’expansion monétaire soutenu, quoique se modérant, dans la zone euro. Les évolutions monétaires confortent par conséquent l’opinion selon laquelle les tensions inflationnistes s’atténuent encore, alors que certains risques demeurent orientés à la hausse à moyen et à long termes.

Il faut bien se rendre compte que l’intensification des turbulences sur les marchés de capitaux depuis la mi-septembre pourrait marquer un tournant dans les évolutions monétaires. Les données les plus récentes sur la monnaie et le crédit montrent que cette intensification des turbulences exerce une incidence significative sur le comportement des intervenants de marché. Jusqu’à présent, ces évolutions ont revêtu, dans une large mesure, la forme d’un mouvement de substitution entre les composantes de l’agrégat large M3 plutôt que d’une modification brutale de l’évolution de M3.

Les données les plus récentes, disponibles jusqu’à fin octobre, font apparaître une poursuite de la modération du rythme de croissance des prêts consentis au secteur privé non financier. Dans le même temps, pour la zone euro dans son ensemble, aucun signe patent d’un assèchement de l’offre de crédit n’a été observé. Le taux de croissance annuel des prêts aux ménages a encore diminué, reflétant l’affaiblissement des perspectives d’évolution de l’activité économique et du marché de l’immobilier résidentiel ainsi que le durcissement des conditions de financement. Les données mettent en évidence les effets de l’intensification des turbulences financières sur le comportement des banques. Si l’on adopte une vision prospective, il est nécessaire de disposer de données supplémentaires et de poursuivre l’analyse pour formuler un jugement solide.

En résumé, de nombreux éléments montrent que les tensions inflationnistes continuent de s’atténuer et que les taux d’inflation devraient être conformes à la stabilité des prix à l’horizon pertinent pour la politique monétaire, soutenant le pouvoir d’achat des revenus et de l’épargne. Le recul des taux d’inflation s’explique principalement par la baisse des prix des matières premières et le ralentissement sensible de l’activité économique lié pour une large part aux répercussions des turbulences financières à l’échelle mondiale. Le recoupement des conclusions de l’analyse économique avec celles de l’analyse monétaire confirme ce diagnostic. Tout en demeurant soutenu, le rythme sous-jacent d’expansion monétaire a continué à décélérer. Dès lors, prenant en considération l’ensemble des informations et des analyses disponibles, le Conseil des gouverneurs a décidé de réduire une nouvelle fois les taux directeurs de la BCE de 75 points de base. Globalement, le niveau d’incertitude reste exceptionnellement élevé. Le Conseil des gouverneurs continuera d’assurer un ancrage solide des anticipations d’inflation à un niveau compatible avec son objectif à moyen terme. Il soutient ainsi durablement la croissance et l’emploi et contribue à la stabilité financière. En conséquence, nous continuerons de suivre très attentivement l’ensemble des évolutions au cours des prochaines semaines.

En ce qui concerne les politiques budgétaires, le Conseil des gouverneurs considère qu’il est essentiel de maintenir la discipline et une perspective de moyen terme, en prenant pleinement en compte les conséquences de toute action à court terme pour la soutenabilité des finances publiques. Il est extrêmement important de sauvegarder la confiance du public dans la solidité des politiques budgétaires, en appliquant dans son intégralité le cadre budgétaire de l’Union européenne fondé sur des règles et en préservant pleinement son intégrité. Les dispositions du Traité de Nice et du Pacte de stabilité et de croissance exigent une perspective de moyen terme et prévoient la souplesse nécessaire. Les stabilisateurs budgétaires automatiques sont relativement importants dans la zone euro et apportent un puissant soutien budgétaire à une économie affaiblie. Lorsqu’il existe une marge de manœuvre, des mesures budgétaires supplémentaires pourraient être efficaces si elles sont ciblées, temporaires et mises en œuvre rapidement.

S’agissant des politiques structurelles, la période actuelle de faible activité économique et l’incertitude élevée quant aux perspectives économiques rendent nécessaire un renforcement de la capacité de résistance et de la flexibilité de l’économie de la zone euro. Les réformes des marchés de produits doivent favoriser la concurrence et accélérer la mise en œuvre de mesures de restructuration efficaces. Les réformes du marché du travail doivent contribuer à faciliter le processus de fixation adéquat des salaires ainsi que la mobilité de la main-d’œuvre entre les secteurs et les régions. La situation actuelle devrait dès lors être considérée comme un catalyseur pour encourager la réalisation des réformes intérieures nécessaires, conformément au principe d’une économie de marché ouverte dans un régime de libre concurrence.

Nous sommes maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions.

Veuillez consulter la version anglaise pour les termes exacts approuvés par le Conseil des gouverneurs.

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